François Bayle - Fabulae & Théatre d'ombres

Fabulae

Fabulae est le pluriel du latin fabula qui veut dire "histoire", parce que l'histoire musicale électronique enregistrée par François Bayle est composée de plusieurs chapitres, ou plusieurs "points de vues" auditifs sur , si l'on peut dire.
Le fil de l'histoire est constitué de votre écoute, bondissante d'un plan sonore à un autre. Combien de plans sonore entendez-vous en même temps ? Pouvez-vous les suivre se différencier ? s'emmêler ? se transformer ?

Lors de la Cinquième Ode électrique, les improvisations ont porté seulement sur les deux premiers mouvements :

1er mouvement : Fabula


La Fabula, c'est le voile tendu, ou le fil de l'histoire que suit le compositeur, et qu'il invite l'auditeur à suivre. Mais qu'est-ce qui tient ? Quelle est la nature de cette continuité ? Cette première pièce rappelle Théâtre d'Ombres : ici, de nouveau, “ s'ordonne le bruissement multiple ”, le disparate se trouve magiquement agencé. L'écriture éclaboussée et les turbulences permanentes (comme si le dessin ne pouvait être juste que tremblé) génèrent un chant unique. Des intervalles, (ascendant, annulé, descendant, augmenté, resserré) s'opposent aux chocs et aux irrégularités morphologiques du paysage sonore — cependant, “ l'intervalle ascendant s'affirmera et dominera ”.

 

2e mouvement : Onoma


Onoma fait référence à onomatopée, c'est-à-dire à la possibilité de créer des mots qui imitent des sons. Cette pièce est la plus imagée et figurative du cycle. Elle utilise des sons courts et reconnaissables, notamment des voix d'enfants. Elle propose cinq “cartes postales” animées, faussement naïves, non titrées mais nommées dans la notice  : clair de lune, tango, tohu-bohu, balançoire, rebondissements.

  Pour "rencontrer" le compositeur

C'est toujours un grand plaisir d'entendre François Bayle parler de musique, à la fois simplement, comme quelqu'un qui serait un écoutant (comme tout le monde donc) avant d'être un musicien, et très subtilement, très poétiquement. Par chance, France Culture lui a consacré une Nuit rêvée.

Les notes de programme sur les pièces sont extraites de son catalogue ; vous trouverez sur le net une présentation de son œuvre sur le site de l'IRCAM ainsi que sa biographie ; ou encore une critique de Fabulae. Les troisième et quatrième mouvements peuvent être écoutés sur Youtube.

Théâtre d'ombres

Une autre improvisation a porté sur le début d'une autre œuvre de François Bayle, Théâtre d'Ombres, plus longue, que vous pouvez écouter en entier tranquillement, comme une méditation sonore. Pour moi, ce "théâtre d'ombres" est une image de cette musique électronique, acousmatique comme l'appelait François Bayle, où il n'y a rien à voir, aucun musicien, aucun instrument, et tout à écouter, la musique vibrant dans l'air comme venant de nulle part, si ce n'est de haut-parleurs. La pièce est en deux mouvements enchaînés : … derrière l'image et … ombres blanches. Le texte d'introduction écrit par le compositeur peut paraître un peu compliqué parce que poétique, mais certaines images évoquent très bien les sons que l'on entend (j'ai souligné).


Une magie nous capture d'entrée de jeu au commencement de …derrière l'image, avec cette impression de célérité douce : comme de foncer sur des rails aériens. La sonorité est évidée, à la fois sifflante et tranquillement crénelée par dessous. C'est elle le vecteur de ce transport merveilleux qui semble ordonner et faire éclore à son passage tout le disparate du monde alentour. Tout devient facile, tout se déplie et se déploie de soi-même. Même les désordres les plus bruyants — piétinements, tambourinages, intrusions diverses — s'y dissolvent. Cette partance perpétuelle vers “ le pays où l'on n'arrive jamais ” nous mène cependant à la seconde partie.
…ombres blanches. Le voilà peut-être, le “pays” (un royaume d'air). S'ouvre un espace nouveau, comme inverse, large et mystérieux, foisonnant et léger : d'une sérénité hirsute. La voix humaine lui donne une autre présence — qui évoque l'univers de Daphnis et Chloé (Ravel) — motifs chatoyants, chœurs fragiles, contours nimbés, sonorités flûtées, lascives ou rapides.

Commentaires